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[   Band 6 Brief 123:    Humboldt an Caroline    London, 15. September 1818   ]


»J’ai reçu avant quelques jours Votre lettre du 4. et il me
serait difficile de Vous dépeindre au juste l’impression qu’elle m’a
faite. J’attache, et Vous n’en sauriez douter après les années
que nous avons passées ensemble, le plus grand prix à Votre
bienveillance et à Votre amitié; ainsi le ton amical qui règne
dans Vos lignes, la bonté de Vos observations, les assurances
que Vous me donnez de penser à ce que Vous me croyez véri-
tablement utile, tout cela m’a vraiment touché et je Vous en re-
mercie sincèrement. Mais de l’autre côté je vois que le Roi n’a
pas même encore ma lettre, que Vous ne semblez pas avoir pensé
seulement au choix de mon successeur, que tout le temps qui
s’est écoulé depuis le mois d’A‘vril a été perdu pour mon but, et
que c’est comme si je ne commençais qu’aujourd’hui a faire des
démarches. Je Vous disais positivement en Vous priant dans
ma lettre du mois de Mai de ne pas attendre le retour de Sa
Majesté pour arranger mon affaire, que ce délai me rendrait
vraiment malheureux, et malgré cela Vous avez laissé entièrement
dormir l’affaire en attendant. Si au moins Vous aviez eu la
charité de me dire, ce qui ne Vous coutait vraiment que deux
mots, que Vous trouviez mieux de ne pas envoyer mon placet au
Roi, si Vous m’aviez proposé alors de demander un congé, j’aurais
pû le faire pleinement d’après Votre idée a cette époque, j’aurais
pû Vous adresser mes représentations, j’aurais pû prendre moi-
même des mesures. Aprésent j’ai perdu un temps qui m’est si
infiniment précieux, et même ma situation vis a vis du Roi est
moins bonne, puisque Sa Majesté sans avoir vu la véritable tenue
de ma demande doit avoir entendu tous les bruits qu’on s’est
plu a répandre sur mon compte. Je ne doute pas un moment
que Vous n’ayez agi dans les intentions les plus amicales envers
moi, mais pardonnez si je Vous dis malgré cela franchement que
Vous m’avez causé un mal beaucoup plus sensible que je ne puis

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